vendredi 4 novembre 2016

Le chamois apeuré

La fable illustrée étant devenue mon genre, le chamois de nos massifs m'a inspiré.



Le chamois apeuré

L'Isard, roi des sommets, mais craintif à l’envie,
Au pied d’une paroi, croyant voir un chasseur
Se fit peur
S’enfuyant au bout de sa vie.
Dame Peur le confond aux tourments de l’angoisse
Sans qu’il n’en vit la poisse.
Le chamois eut peur de son ombre
Il eut peur de sa peur trop sombre.
Avec émoi, gardant l’aisance, il court encore
Il saute, il bondit, va jusqu’au bout du décor
Un endroit périlleux où d’aucuns ne s’immiscent,
Sans jamais qu’il ne puisse
De sa nuque blanc jaune en rectifier la course.
Dans les neiges éternelles, il était aux limites
Il vit l’eau qui coulant de  source,
Au bord du précipice le stoppa dans sa fuite.
Que le Maître des Dieux dédaigne
Intervenir sur les règnes,
Qui l’eut cru ? Exception fut faite.
Le conseil divin au plus haut des faîtes
Lui rappela les peurs qu’il avait maîtrisées :
Des sommets, peur de la solitude d’Écho
Peur de changer de peau, de Janus la risée
Peur de la mort d’Hadès, la fin des haricots
Sensible à Prométhée par crainte des souffrances,
Ou Méduse insufflant la phobie des angoisses ;
Et même en aberrance
La peur du bonheur des trois Grâces
Il aurait dû ruminer d’extase à son âge
Dans ses beaux pâturages !
Il s’était hasardé, n’ayant plus que l’abîme
Ne pouvant plus ni avancer ni reculer
Il n’avait plus rien de sublime
Devant cet abysse, acculé.
Ce n'est pas si facile que d'ouïr les Dieux ;
Parfois, cela déclenche des troubles morbides.
S’esbignant du névé au plus haut de ces lieux
D’un benêt saut d’âne il se jeta dans le vide.
Quoiqu’on dise sur les peurs et sur leurs dilemmes
Il n’est pas pire peur que la peur de soi-même.

3 commentaires:

  1. Comme d'habitude c'est excellent. Que de détails et de suspense. Merci
    Sébastien

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  2. Merci pour ce beau moment de lecture. C'est génial de pouvoir écrire d'aussi belles fables. Bravo.
    Doriane

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  3. Merci pour le partage d'une telle fable si agréable
    Peter

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