mardi 6 octobre 2015

Les trois chiens

Vous connaissez maintenant le principe... J'expurge une de mes vieilles aquarelles représentant des animaux et je concocte une fable autour de l'image. Ce sera donc la cinquième qui s'intitule : " Les trois chiens " ; elle est aussi un clin d'oeil à un réconfortant ami et toubib arlésien qui apprécie plus particulièrement la morale. 




Les trois chiens

Ils étaient trois compères
Chiens mâtins et molosses
Échangeant leurs affaires
Aux bons soins de Chronos.
Néron chien de berger et Milord chien de garde
Geignaient près de Briffaut de sa mine bâtarde
Navrés qu’un chien de cour
Soit ainsi affamé
Et qu’au moindre détour
Soit aussi diffamé.
Pour eux point de quartier
C’était un émeutier
Raz, torve, à l’œil sanglant et au poil hérissé
La bête apitoyait par sa mise en danger.
« Nom d’un chien ! Par la faim que vous êtes angoissé,
Fi donc ! Ce nom, Briffaut, il convient d’en changer !»
« Pour m’appeler Milord
Japper, donner la patte,
Ou Néron qui ne dort
Tant sa tâche est ingrate ?
Si je crève la faim,
J'en réclame la chance
Je vois tous les confins
Et n'est pas de défiance. »
Répondit donc Briffaut
D’un ton très comme il faut.
« Le bel état où l’on vous voit
Me fait rester clébard cerbère
Je bois toujours au même endroit
Définitivement pépère ! »
Osa brailler Néron, vieux dogue, montrant ses dents.
« Quant à moi j’aime le couffin du résident
Inéluctablement au chaud et à l’abri. »
Glapit Milord en méchant mâtin assombri.
Les butors crurent ainsi sermonner l’insouciant.
Briffaut, fier, heureux, dit sa joie en aboyant :
« Point de jaloux entre vous, fidèles messires
Je vous laisse grossir ;
Je vois jour après jour
Tant de vieux cons, que j’en peux mais,
La plupart du temps opprimés
Avalant sans amour
Leur pitance au chenil ;
Poursuivez ce babil
Car chacun d’entre vous, le matois, le féroce
Prête donc à croire que vous faites la noce. »
Il crut perdre la vie,
Par une prise aux dents
Mais vit avec le temps
Qu’ils n’avaient pas l’envie
Qu’il y eut rixe et empoignade,
Tant ils étaient dans la panade
Par leur tranquille étiolement.
D’un dernier aboiement
Il leur fit un salut
Et quitta les poilus.
Lui, libre sous le firmament
Vagabondait allégrement
Vivant, sautant, affirmant sans engagement
Que rien n’est définitif, sauf le changement.


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