mardi 9 octobre 2018

La Cigogne et le Pélican

La dernière fable s'attaque à la méchanceté, sur le balancier de la dualité entre le bien et le mal



Le Cigogne et le Pélican


Selon saint Epiphane
Le pélican est plus méchant que le vautour,
A tel point qu’au détour, cet animal profane
Ôte la vie de ses petits par désamour.
Laissez-moi vous narrer un de ces sans vergogne
S’en prenant à une cigogne,
Le bel échassier migrateur
Oiseau de bon augure pour le sage
Et porteur de présage.
Pour son voyage pacificateur
Elle prit un pélican, durant son absence
Tout sourire, comme seul régisseur du nid
Laissant aïeux et cigogneaux sans réticence
Afin qu’ils ne soient démunis ;
Lorsque l’on dit que qui se ressemble s’assemble
C’est vrai. Mais entre le bien et le mal on tremble ;
Le pélican à la grande envergure
Fils de lumière couvant l’œuf du monde
Qui apporte son cœur pour toute nourriture
Si loué par Dante, est ô combien immonde.
Plus tard, revenant voir les siens
Après son long périple
L’oiseau au long cours alsacien
Plonge vers ses chers condisciples
Au bord de l’étang où veillait le pélican
Bien plus grotesque que flippant.
Il venait d’engloutir trois carpes et deux pigeons.
« - Que nous vaut ce retour ?
Vos aïeux ont crevés, durant votre séjour ! »
Dit-il, éclusant un gorgeon,
La poche du bec pleine,
En laissant étaler sa haine.
 « - Faute de délicatesse
Vous pourriez au moins être aimable ! »
Répondit le migrateur instable
En cachant sa tristesse.
« - Je vous vois seul au nid, où est donc ma famille ? »
« - Faudrait-il qu’il en reste ! »
« - Qu’est-ce à dire, oiseau de pacotille ? »
Rictus narquois, propos de l’immodeste :
« - Nous devons aux parents
Notre âme et notre sang !
Celui qu’il faut répandre
A d’autres il faut le rendre ! »
Il semblait ergoter d’une empathie soudaine
« - Vos six cigogneaux ne sont plus dans la déveine
Quoique faute de nourriture
Ma chère amie, ils partaient dans la nature
Loin, au diable-vauvert
Se mettre à découvert. »
« - Mais qu’advint-il ensuite ? »
« - Je les ai aidé sans limite. »
Dit-il, baissant la tête et roulant ses gros yeux.
« C’est-à-dire ? »
Il devint obséquieux.
« - Je les ai fait se dégourdir
Mais un peu loin du gite
Ils se reposent derrière les bambous
Un peu sur les genoux
Morfondus d’inconduite. »
« - Merci pour tout, comment vous remercier ? »
« - Ma belle amie, mais c’est assez
Vos deniers, votre nid
Et votre sympathie
Tout ça j’en suis ravi
Sans vous l’avoir ravi. »
Le manipulateur aux paroles flatteuses
Qui ment et induit en erreur pour le chaos
Eut un sourire narquois, la regardant de haut
Quand la cigogne s’éloigna heureuse
De retrouver ses proches.
Toujours désireux du contrôle de l’autre
Il se nourrissait des souffrances des autres
Sans état d’âme ni reproche.
Au détour du chemin,
En trouvant les six cadavres des siens.
Si le Pélican cancana
La cigogne en cana.
La vie ne nous épargne
La venue des méchants et leur drôle de hargne
Sans un remords prenant plaisir à maltraiter
Et leur méchanceté pouvant se faire pire,
En prenant le masque de la bonté.
Du méchant méfiez-vous des sourires.

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